Collecte automatisée des données numériques : Joël Giraud réécrit le dispositif expérimental afin de garantir le respect des libertés publiques tout en renforçant la lutte contre la fraude fiscale et le trafic illégal, notamment de tabac

Gerald Darmanin et Joel Giraud
Gérald Darmanin, Ministre de l'Action et des Comptes Publics, et Joël Giraud, Rapporteur général du budget, ensemble dans l'hémicycle, symbole d’un dispositif co-construit entre le gouvernement et l'Assemblée nationale.

Dans le cadre du projet de loi de finances (PLF) pour 2020, le Parlement a ouvert la possibilité pour l’administration fiscale et douanière, à titre expérimental pour une durée de trois ans, de collecter et exploiter, au moyen de traitements informatisés et automatisés, les contenus librement accessibles qui sont publiés sur internet par les utilisateurs (Facebook, Instagram, Amazon ect…).

Il est nécessaire de rappeler que l’administration procède déjà à des recherches de renseignements sur internet. Ces recherches sont faites par des êtres humains. L’article voté autorise uniquement que ces recherches soient effectuées par des robots à l’aide d’algorithmes.

Cette expérimentation intervient dans un contexte où l’Etat enregistre des résultats probants en matière de lutte contre la fraude fiscale. En effet, à la fin du mois d’octobre, ce ne sont pas moins de 5,6 milliards d’euros qui ont été recouvrés, contre 4 milliards d’euros à même époque l’an passé, soit une hausse de 40%.

Ces chiffres s’expliquent notamment par l’apport croissant de l’intelligence artificielle qui permet de mieux déceler les grosses fraudes. Ainsi, le dispositif prévu à l’article 57 du PLF pour 2020 doit permettre de renforcer cette dynamique.

Cependant, il fallait absolument préserver une certaine proportionnalité entre détection de la fraude et respect de la vie privée, deux objectifs à valeur constitutionnelle.

C’est pourquoi, suite notamment aux réserves exprimées par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), le rapporteur général du budget a intégré un certain nombre de garde-fous, avec la bienveillance du gouvernement qui souhaitait l’avis du Parlement sur ce dispositif qu’il aurait pu mettre en place par voie réglementaire.

En premier lieu, Joël Giraud a introduit, au nom de la commission des finances, un amendement qui restreint le champ d’application du dispositif expérimental aux cas les plus graves relatifs à l’économie souterraine et de soustraction volontaire à l’impôt français. Cela exclut 97 % des manquements fiscaux et limite donc le champ des données qui pourront être conservées. De même, s’agissant des infractions douanières, l’amendement resserre le champ d’application aux seuls délits et exclut les contraventions. En revanche, les commerces illicites de tabac et d’alcool sont bien évidemment maintenus. L’exclusion de la majorité des manquements de moindre importance permet d’ailleurs de mettre l’accent sur la lutte contre un trafic souterrain qui s’organise et se digitalise, en particulier dans les départements frontaliers.

Grâce au concours essentiel de la commission des lois qui s’est saisie pour avis, et en particulier de son rapporteur Philippe Lacombe, le recours à un sous-traitant a été expressément interdit afin de renforcer la sécurité des traitements envisagés étant donnés le volume et la sensibilité des données susceptibles d’être collectées.

Concernant la conservation des données à proprement parler, la commission des finances a précisé que seules les données manifestement rendus publiques pourront être collectées, en reprenant les termes de l’article 9 du règlement général sur la protection des données (RGPD) de l’Union Européenne, et que seules les données «strictement nécessaires» seront conservées pour une durée maximum d’un an, et non pas toutes les données «de nature à concourir» à la constatation de manquements et infractions comme le prévoyait le gouvernement. A l’initiative du groupe La République en Marche, toutes les données sensibles manifestement sans lien avec les infractions intégrées au périmètre du dispositif seront détruites sous 5 jours après leur collecte.

Enfin, en plus de l’évaluation globale prévue au terme de la période d’expérimentation, un bilan intermédiaire devra être réalisé au bout d’un an et demi et remis au parlement ainsi qu’à la CNIL.

Le député des Hautes-Alpes se réjouit donc de l’adoption de ces divers amendements qui donnent des garanties suffisantes aux citoyens en termes de protection des libertés publiques tout en conservant l’ambition gouvernementale en matière de lutte contre la fraude fiscale grâce à l’intelligence artificielle.