Projet de loi de finances pour 2020 : le budget de l’équité territoriale

Le budget 2020 comporte de nombreuses mesures en faveur des collectivités rurales

Alors que le Projet de loi de finances pour 2020 a été définitivement voté aujourd’hui en première lecture à l’Assemblée nationale, il est temps de revenir sur les principales mesures qui concernent les collectivités territoriales, et d’une manière générale les territoires,  à commencer par la réforme de la fiscalité locale qui redonne du pouvoir d’achat aux français sans perte de ressources pour les collectivités, en passant par la refonte du système de péréquation entre départements qui assure une plus grande équité territoriale.

Une réforme de la fiscalité locale qui redonne du pouvoir d’achat aux français sans perte de ressources pour les collectivités territoriales

Conformément aux engagements de campagne du Président de la République, le projet de loi de finances (PLF) pour 2020 exonère 80% des foyers de la taxe d’habitation (TH) sur les résidences principales à compter de 2020 et prévoit la suppression totale de la TH sur les résidences principales à l’horizon 2023, pour tous les français, en conservant une taxe sur les résidences secondaires et les logements vacants.

Pas suffisamment corrélé au revenu du contribuable, cet impôt injuste pèse en moyenne 723 € par an par foyer. Sa suppression redonne plus de 15 milliards d’euros de pouvoir d’achat annuel aux français. Il s’agit de la plus forte baisse d’imposition des ménages des dernières décennies.

Elle s’effectuera sans perte de ressources pour les collectivités territoriales : l’Etat paiera la TH à la place des ménages en 2020 puis compensera à partir de 2021 la perte de recettes aux collectivités territoriales à l’euro près. Cette compensation intégrale a notamment été renforcée par Joël Giraud qui a fait adopter un amendement permettant le dégel des bases des valeurs locatives retenues pour l’établissement de la TH en les indexant sur l’indice des prix à la consommation constaté en septembre 2019 (soit 0,9%).

Les communes, dont un tiers des ressources fiscales provient de la TH, seront compensées par le transfert de la part départementale de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) en leur faveur. Ce transfert sera complété par un mécanisme de coefficient correcteur pour neutraliser les écarts entre le produit de la TH et le produit de la part départementale de TFPB transférée. Toutefois, les 7600 communes « surcompensées », essentiellement rurales, garderont leur surcroît de recette s’il est en deçà de 10000 euros, une très bonne nouvelle pour les petites communes.

Les départements et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre, concernés respectivement par le transfert de leur part de TFPB vers les communes et par la suppression de la TH, sont quant à eux compensés via l’affectation d’une fraction de TVA. La perte de recette est ainsi compensée par une ressource dynamique, c’est-à-dire dont le produit évoluera au cours du temps en fonction de la croissance économique.

Un verdissement des dotations en faveur des communes rurales

Le PLF pour 2020 est aussi un budget en faveur de la transition énergétique avec plus de 800 millions d’euros consacrés à l’urgence écologique : suppression de l’avantage fiscal sur le gazole non routier, éco-contribution sur les billets d‘avion pour financer les infrastructures de transport à hauteur de 180 millions d’euros, transformation du crédit d’impôt transition énergétique (CITE) en prime pour les ménages les plus modestes, etc.

Concernant les communes, l’Assemblée nationale a adopté, à l’initiative du Rapporteur général du budget et à l’unanimité des votants, un amendement instaurant une dotation de soutien aux communes pour la protection de la biodiversité. Cette dotation, d’un montant de 10 millions d’euros (contre 5 millions d’euros l’an passé), permettra d’apporter un soutien financier aux communes qui participent à la protection de la biodiversité. Elle est composée de trois fractions.

La première fraction concerne les communes situées dans une zone Natura 2000, qui comptent moins de 10 000 habitants et sous conditions de potentiel financier, élargies aux communes relevant des critères de la dotation de solidarité rurale, avec toujours la nécessité d’avoir un territoire couvert à plus de 75%. Près de 1 200 communes bénéficieront de cette fraction pour un montant total de 5,5 millions d’euros.

Une seconde fraction concerne les communes ayant au moins une partie de leur territoire dans un cœur de parc national qui sont au nombre de 178, sous condition d’adhésion de la commune à la charte du parc national, pour un montant total de 4 millions d’euros.

Cette dotation encourage les communes à s’investir en faveur de la protection de la biodiversité et de la transition écologique.

En plus d’accompagner les communes, Joël Giraud a redonné des moyens supplémentaires aux parcs nationaux, fers de lance de la transition écologique, en débloquant 500 000 euros pour la création de 8 équivalents temps-plein, une disposition d’autant plus nécessaire que le onzième parc national de France vient d’être créé.

Afin d’adapter la fiscalité écologique aux territoires de montagne, Joël Giraud a aussi porté un amendement autorisant un taux réduit de taxe intérieure de consommation pour les engins de nivellement de la neige. Il vise donc tous les engins utilisés aux fins de missions de service public en zone de montagne : exploitation des routes ou damage. Cela doit soulager les finances des communes mais aussi des départements montagnards, notamment les plus ruraux qui n’ont pas de réseaux routiers nationaux ou autoroutiers très développés.

De même, pour accompagner la hausse de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) sur le GNR, le PLF pour 2020 prévoir un dispositif de suramortissement dans certains secteurs, notamment les travaux publics. Un amendement ayant reçu l’avis favorable du rapporteur général le complète en y ajoutant le secteur du bâtiment. Joël Giraud a quant à lui fait adopter un amendement portant le nouveau mécanisme de suramortissement à 60% du prix d’acquisition des véhicules et matériels de remplacement pour les petites ou moyennes entreprises (PME), plus fortement impactées par l’évolution du régime du gazole non routier du fait de marges inférieures à celles que dégagent les entreprises plus importantes. Ces mesures sont également essentielles aux collectivités territoriales afin qu’elles ne subissent pas une répercussion brutale sur les prix.

En outre, le gouvernement a proposé une évolution du fonctionnement de la dotation de solidarité communautaire (DSC), en lien notamment avec la prorogation des contrats de ville jusqu’au 31 décembre 2022 prévue à l’article 181 de la loi de finances pour 2019. Les communautés de communes et les communautés d’agglomération continueront de pouvoir facultativement verser une DSC à leurs communes membres ; et les métropoles et communautés urbaines devront verser une DSC à leurs communes membres, dont elles fixeront librement le montant. L’amendement prévoit aussi que les intercommunalités signataires des contrats de ville adoptent, avant le 30 juin 2021, un nouveau pacte financier et fiscal. L’amendement clarifie les critères de répartition de la DSC : au moins 50 % de son montant devra être réparti en fonction du potentiel financier et du revenu par habitant des communes. Ces deux critères devront être pondérés de la population. Le conseil communautaire pourra librement définir d’autres critères de répartition.

Actualisation de la taxe de séjour

Trois amendements de la commission des finances portés par le Rapporteur général corrigent certains dysfonctionnements dans l’application et le recouvrement de la taxe de séjour. D’abord, la taxe de séjour forfaitaire pour les hébergements en attente de classement ou sans classement, soumis à une taxation proportionnelle comprise entre 1 % et 5 % du coût par personne de la nuitée, est supprimée car elle s’avère irréalisable pour la taxe de séjour au forfait (réglée par chaque lieu d’hébergement): il convient donc de privilégier, dans ce cas, l’utilisation de la taxe de séjour au réel.

Dans le même esprit, un tarif spécifique de taxe de séjour est mis en place pour une nouvelle catégorie d’hébergement, les auberges collectives, qui incluent en particulier les auberges de jeunesses et les refuges, et remplace le taux proportionnel. Le barème applicable sera celui qui prévalait avant l’application du taux proportionnel, soit entre 0,20 et 0,80 euros. Ces hébergements étaient en effet frappés injustement par le taux proportionnel qui a pour but d’inciter au classement des hébergements, avec l’objectif d’une montée en gamme et en qualité de l’accueil des touristes, or les établissements de type auberge collective ne peuvent prétendre aujourd’hui à un classement existant et ne disposent d’aucune qualification juridique au sens du code du tourisme.

Enfin et surtout, les plateformes d’intermédiation locative seront désormais tenues verser aux collectivités territoriales la taxe de séjour collectée deux fois par an, avant le 30 juin et le 31 décembre de l’année, contre une seule fois auparavant. Cela redonne des marges de manœuvre aux communes et EPCI.

Des dispositions pour redynamiser l’économie et l’immobilier en zone rurale

Considérant que 60% de logements vacants en France sont situés dans des territoires ruraux, dont 25% dans des communes rurales, une disposition introduite par le groupe de La République en Marche proroge le dispositif dit « Denormandie », qui incite à la rénovation dans les logements situés dans les villes confrontées à un habitat dégradé en ouvrant un droit à des exonérations fiscales pour des travaux de rénovation dans le bâti ancien, jusqu’au 31 décembre 2022 et supprime la notion de centre qui était trop complexe et restrictive. Cette mesure doit redynamiser le parc locatif dans les zones rurales.

Pour préserver le favoriser le développement local et les embauches dans les zones de revitalisation rurale (ZRR), le dispositif d’exonération fiscale pour les entreprises implantées dans ces zones est prolongé jusqu’à fin 2020, alors que son terme était prévu pour juin, dans le but de prendre le temps de mieux cibler les territoires qui en ont le plus besoin et renforcer son efficacité.

A l’initiative de députés de tous bords, le bénéfice du « prêt à taux zéro » (PTZ) pour l’acquisition d’un logement neuf dans les zones B2 et C, dites détendues, souvent rurales, est maintenu afin de permettre aux familles modestes d’accéder à la propriété et d’éviter de créer une inégalité territoriale.

Une péréquation renforcée au bénéfice des départements les moins riches comme les Hautes-Alpes

Le PLF pour 2020 met en place un système plus juste de péréquation horizontale entre les départements riches et pauvres, sur proposition de l’Assemblée des départements de France (ADF). Les prélèvements opérés au titre du fonds national de péréquation des DMTO, du fonds de solidarité des départements (FSD), et du fonds de soutien interdépartemental (FSID), sont fusionnés et remplacés par un mécanisme unique composé d’un prélèvement proportionnel à l’assiette des DMTO appliqué à tous les départements, pour une contribution totale d’environ 850 M€ ; et un prélèvement fixe de 750 M€, pour les seuls départements dont les DMTO/hab sont supérieurs à 75 % de la moyenne. Ce prélèvement s’appliquerait de manière progressive en permet de faire contribuer davantage les départements les mieux dotés (avec un plafond à 12 % des DMTO perçus l’année précédente).

Ainsi, le nouveau système fera gagner 1,5 millions d’euros aux Hautes-Alpes des 2020 (alors par exemple que les Alpes-Maritimes perdent 21 millions d’euros).

De même, un amendement du Gouvernement prévoit une affectation dès 2021 d’une fraction de TVA en faveur des départements les moins riches, pour un montant de 250 millions d’euros qui évoluera ensuite de manière dynamique en étant indexé sur les recettes de TVA. Le surplus, au fil des années, alimentera un fonds de sauvegarde pour aider les départements en cas de retournement économique. Cela permettra aux Hautes-Alpes de disposer de 800 000 euros supplémentaires par an. C’est le seul département avec les Alpes de Haute-Provence à en bénéficier dans la région PACA.

Enfin, pour éviter notamment au département des Hautes-Alpes de perdre une nouvelle fois près de 5% du montant de son enveloppe de dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR), le rapporteur général est à l’initiative d’un amendement gouvernemental visant à geler le montant 2020 de la DETR à son niveau de 2019. Un groupe de travail parlementaire sera mis en place début 2020 afin d’effectuer un état des lieux de cette réforme et d’esquisser des pistes d’évolution pour la concentrer davantage vers les territoires ruraux et en situation de fragilité.

Plus largement, la dotation de solidarité rurale (DSR) augmente une nouvelle fois de 90 millions d’euros.

Davantage de moyens pour notre agriculture

Afin de faciliter l’installation et le développement des exploitations agricoles, un amendement du député des Hautes-Alpes introduit deux dispenses au versement de l’indemnité compensatoire lors de défrichements. Cette indemnité, qui peut atteindre jusqu’à 5 000 euros par hectare, mettait parfois en péril la pérennité des exploitations agricoles. Sont concernés par ces dispenses les défrichements réalisés dans le cadre d’une création, reprise ou extension d’une exploitation agricole située en zone agricole ou en zone naturelle et les défrichements réalisés par l’exploitant d’un terrain agricole de petite surface sur lequel est prévu la réalisation d’ouvrages de défense contre l’incendie. Ces dispenses demeurent donc très ciblées, évitant tout risque de défrichements excessifs sans compensation.

Joël Giraud a également œuvré pour les chambres d’agriculture en faisant voter la suppression de la baisse de 45 millions d’euros du plafond d’affectation du produit de la taxe additionnelle à la taxe foncière sur les propriétés non bâties au réseau des chambres d’agriculture et aux bénéficiaires des « centimes forestiers ». Il a fait maintenir l’affectation de la taxe aux chambres départementales au lieu de l’affectation aux chambres régionales proposée par le gouvernement. En outre, le gouvernement devra remettre un rapport à l’horizon juin 2020 portant sur les modalités de financement de l’ensemble des affectataires de la taxe et sur le processus de modernisation et de mutualisation du réseau des chambres.

Concernant les chambres de commerce et d’industrie (CCI), le prélèvement dit « France Télécom », qui représentait un montant global de près de 29 millions d’euros sur l’ensemble du réseau, est supprimé. Un véritable bol d’air notamment pour les petites CCI.