Lu sur leparisien.fr : « Impôt sur la fortune immobilière, «flat tax»… combien ont rapporté ces réformes fiscales »

L’impôt sur la fortune immobilière a rapporté près de 1,3 milliard d’euros en 2018.

Le remplaçant de l’ISF a rapporté un chiffre supérieur aux prévisions de Bercy. Décryptage avec Joël Giraud, député LREM et rapporteur général de la loi de Finances.

Dès la rentrée, Joël Giraud, député LREM des Hautes-Alpes et rapporteur général de la loi de Finances, sera l’un des acteurs clés du prochain budget 2020 de la France. Or l’exercice promet d’être délicat, puisqu’il faudra financer plusieurs mesures prises pour apaiser la colère des Gilets jaunes…

En attendant, le député a d’ores et déjà décortiqué l’impact de quelques réformes fiscales emblématiques du début du quinquennat d’Emmanuel Macron.

La « flat tax » rapporte plus que prévu. La loi de Finances 2018 avait mis en œuvre une promesse présidentielle : l’instauration d’un prélèvement forfaitaire unique (PFU), au taux global de 30 %, également appelé « flat tax » . Celle-ci s’applique aux revenus du capital et de l’épargne, c’est-à-dire essentiellement les intérêts et les dividendes. Bilan pour 2018 ? La « flat tax » a bien fonctionné ! Son rendement a avoisiné 3,5 milliards d’euros, contre une prévision initiale de 2,9 milliards d’euros. Cette différence s’explique notamment par les généreux dividendes versés aux détenteurs d’actions l’an passé.

L’impôt sur la fortune immobilière (IFI) moins efficace que l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). En 2018, l’IFI a rapporté 1 291 millions d’euros, soit environ 400 millions de plus qu’attendu… Mais bien moins que l’ISF, qui taxait tout le patrimoine et avait rapporté 4,1 milliards en 2017. Si le chiffre global était connu, Joël Giraud a obtenu de nombreux détails. Ainsi, 132 722 contribuables ont été soumis à l’IFIavec un patrimoine moyen taxable de 2,33 millions d’euros. La facture moyenne, elle, s’élève à 9 730 euros.

Parmi les Français redevables de l’IFI, les 10 % avec le plus gros patrimoine – c’est-à-dire avec des biens qui, additionnés, représentent un montant supérieur à 3 578 733 euros – ont payé en moyenne 43 697 euros d’IFI en 2018. Le total du patrimoine taxé à l’IFI est de 309,5 milliards d’euros. Pour rappel, ce nouvel impôt frappe les personnes détenant un patrimoine immobilier (maisons, appartements, garages, parkings, etc.) net supérieur à 1,3 million d’euros.

Le flop des taxes sur les yachts et les véhicules de luxe. La transformation de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) en impôt sur la fortune immobilière (IFI) avait donné lieu à une véritable levée de boucliers, y compris au sein de la majorité LREM . Pour se débarrasser de cette étiquette de « président des riches », Emmanuel Macron avait alors acté la mise en place de mesures de compensation.

Premièrement, une taxe spécifique sur les voitures de sport puissantes avait été créée. Rendement estimé de la mesure : 30 millions d’euros dans les documents budgétaires. Mais à l’arrivée, « il apparaît que 3 387 véhicules ont été assujettis à cette taxe en 2018, pour un rendement total de 15 050 000 euros », déplore Joël Giraud.

Deuxièmement, une « surtaxe yacht » avait été instaurée sur les grands navires de plaisance. « Le rendement de la surtaxe avait été évalué, lors de son vote, à 10 millions d’euros », se souvient un cadre de Bercy. Au printemps 2018, le produit collecté n’était pourtant que de… 82 500 euros ! « Un rendement très décevant », s’agace Joël Giraud.

Pour expliquer – en partie – le loupé, la Direction générale des douanes et des droits indirects apporte des explications jugées « obscures » par le rapporteur général du budget : « cinq des sept navires (NDLR : concernés par la « surtaxe yacht ») ne se sont pas, à ce jour, acquittés de leurs obligations fiscales. »


Des niches fiscales très mal connues

Alors que chaque euro comptera dans le prochain budget 2020, Joël Giraud a déclaré la guerre aux « trous noirs fiscaux ». Le rapporteur général du budget à l’Assemblée vise ces niches fiscales dont le coût et le nombre de bénéficiaires sont actuellement… inconnus. « Près de 30 % des dépenses » fiscales, soit 122 niches sur 472, sont « mal chiffrées », selon les calculs du député.

Pire : parmi ces 122 avantages fiscaux, « 64 n’ont aucun chiffrage sur la période 2017-2019 » et « 58 sont chiffrées epsilon », c’est-à-dire avec un coût inconnu mais probablement situé « entre 1 et 500 000 euros ». Les exonérations dont bénéficient les chambres de commerce maritime ou encore l’exonération de TICPE pour certains combustibles (gaz de houille, gaz à l’eau…) entrent, par exemple, dans cette catégorie.

Dans son rapport, le député ne mâche pas ses mots, dénonçant « l’indigence des données disponibles ». « Disons-le tout net, des insuffisances d’une telle ampleur sont inacceptables et le chiffrage des dépenses doit impérativement être amélioré », estime Joël Giraud, qui espère faire la lumière sur ces « trous noirs » à l’horizon 2021.

Par Matthieu Pelloli

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