En 2017, l’aide publique mondiale a représenté 126,2 milliards d’euros, les pays de l’UE apportant la moitié de l’aide (0,51 % du revenu national brut de l’UE).
La France se situe au 5e rang mondial (derrière les États-Unis, l’Allemagne, le Royaume-Uni et le japon), avec une contribution de 10,1 milliards d’euros, soit 0,43 % du revenu national brut. L’aide publique au développement de la France se répartit de la façon suivante :
– l’aide bilatérale, directement apportée à un autre pays, représentant plus de 60 % de l’aide publique française, mise en œuvre pour l’essentiel par l’agence française de développement (AFD) ;
– et l’aide multilatérale, représentant 40 %
Conformément aux engagements pris devant les nations unies en septembre 2015, la capacité d’intervention de l’AFD augmenterait de 4 milliards d’euros d’ici à 2020, pour atteindre 12,5 milliards d’euros. Fin 2017, le Président de la République a confirmé et prolongé cette tendance en souhaitant que la part du revenu national brut consacrée à l’aide publique au développement atteigne 0,55 %, soit 15 milliards d’euros, d’ici à 2022.
Un projet de loi d’orientation et de programmation relative à la politique française de développement et de solidarité internationale devrait être présenté prochainement au parlement. Il préciserait notamment la trajectoire budgétaire pour atteindre les objectifs fixés par le président de la république. Il devrait également renforcer la dimension partenariale de la politique de développement, conformément aux recommandations du rapport sur la modernisation de la politique de développement remis au premier ministre par le député Hervé Berville, le 24 août 2018.
Lors de cette audition par la commission des Finances le 15 mai, le Rapporteur général a interrogé le directeur général de l’AFD sur plusieurs points précis, et notamment celui de l’articulation entre aide au développement et prévention des vulnérabilités et des fragilités qui sont à l’origine des mouvements migratoires.
Une occasion pour l’AFD de rappeler qu’il s’agit là d’une de ses préoccupations majeures, notamment dans la perspective des décennies à venir.
En cela, l’AFD oriente ses programmes innovants et ses actions pour permettre la création d’emplois dans les zones où le potentiel de développement est le plus fort (Afrique australe), afin de permettre aux pays africains qui accueillent des migrants du même continent (telle la Côte d’Ivoire par exemple), de les accueillir au mieux, tout en sortant de la dichotomie pays de transit / pays d’accueil.
Car si le développement n’a pas vocation à stopper les migrations, il doit accompagner les aspirations légitimes des populations à se déplacer.
L’AFD est l’héritière de la caisse centrale de la France libre, institution d’émission monétaire créé en 1941, devenu en 1944 la caisse centrale de la France d’outre-mer. En 1958, elle a été transformée en caisse centrale de coopération économique, puis en caisse française de développement en 1992. En 1998, elle devient l’AFD, actant la réforme de la coopération française et la disparition d’un ministère de plein exercice (et surtout de la distinction héritée de la décolonisation entre « champ » et « hors champ »).
L’AFD est un établissement public de l’état à caractère industriel et commercial (EPIC), doté de la personnalité morale et de l’autonomie financière. L’AFD est également une société de financement qui exerce une mission permanente d’intérêt public, soumise à ce titre à la supervision de l’autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR).
L’AFD constitue en réalité la maison mère d’un groupe, dont la principale filiale est la société de promotion et de participation pour la coopération économique (PROPARCO), qui finance des projets de développement du secteur privé à l’étranger. Par ailleurs, le CICID de 2018 a décidé d’intégrer expertise France au groupe AFD, d’ici à la fin 2019.
L’AFD est dirigée par un directeur général nommé, après avis des commissions parlementaires compétentes, pour trois ans par décret et un conseil d’administration. Le conseil d’orientation stratégique, organe de l’état présidé par le ministre chargé de la coopération, a notamment pour mission de renforcer l’articulation entre les orientations politiques relatives à l’aide publique au développement décidées par le comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) et leurs déclinaisons opérationnelles par l’AFD.
Les objectifs stratégiques des interventions de l’AFD sont définis dans son contrat d’objectifs et de moyens (COM) conclu avec l’état. Le COM 2014-2016 déclinait les grandes orientations de la politique d’aide publique au développement de la France redéfinis par le CICID de 2013, en particulier la priorité renouvelée à l’Afrique, la méditerranée et aux états fragiles, la logique de partenariat économique dans le reste du monde (mandat de « croissance verte et solidaire »), la promotion du développement durable, la contribution au rayonnement économique de la France ainsi que l’évaluation, la production de connaissances et la formation.
Le COM 2017-2019 a adapté ces priorités pour prendre en compte les nouvelles orientations données par le président de la république : éducation, lutte contre le changement climatique, égalité femmes-hommes en particulier. Un nouveau COM devrait être prochainement conclu entre l’état et l’AFD.
L’AFD finance ses activités, soit par l’emprunt sur les marchés financiers, soit par des versements budgétaires de l’état (1,1 milliard d’euros en 2018) ou des ressources déléguées (0,4 milliard d’euros, dont 0,3 milliard d’euros en provenance de l’UE).
En 2018, l’AFD a alloué un total de 11,4 milliards d’euros, répartis entre 10,1 milliards d’euros de prêts (prêts aux états, aux entreprises et collectivités, garanties et prises de participation) et 1,3 milliard d’euros de dons (subventions, dons aux ONG). Cela représente un niveau d’engagements supérieur d’un milliard d’euros à l’exercice 2017, permettant de financer 846 nouveaux projets de développement.
Les fonds sont répartis entre l’Afrique (5,3 milliards d’euros, soit 46 %), l’Asie et le Moyen-Orient (2,8 milliards d’euros, soit 25 %), l’océan indien (1,7 milliard d’euros, soit 15 %) et l’Amérique latine (1,5 milliard d’euros, soit 13 %).
En tenant compte de l’effet levier lié aux partenaires, le niveau total des fonds alloués aux projets s’élève à plus de 30 milliards d’euros.
L’AFD et le fonds dit « Minka »
Présenté en juin 2018, le fonds Minka est un instrument de lutte contre les situations de crise, géré par l’AFD. En 2019, il est doté de 190 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 47,5 millions d’euros en crédits de paiement. il devrait être doté de 200 millions d’euros d’ici à 2020.
Il finance des initiatives dans des bassins régionaux en crise, notamment autour du lac Tchad – avec la présence de Boko Haram –, au moyen-orient dans le pourtour syrien et irakien, au sahel occidental (Burkina Faso, mali, Mauritanie, Niger et Tchad) ou encore en République centrafricaine.
Pour information, le bilan de l’AFD s’élève à 42,9 milliards d’euros en 2018, avec un résultat net de 145 millions d’euros, et un dividende versé à l’état de 29 millions d’euros. L’encours des prêts de l’AFD s’élève à 32,7 milliards d’euros à la fin de l’année 2018, dont 2,75 % prêts considérés comme douteux.
Le rapport de la cour des comptes relatif à l’AFD (février 2019)
La cour des comptes a consacré un chapitre à l’AFD dans son rapport public annuel, publié en février dernier. Elle relève les mutations et la nouvelle ambition de croissance de l’agence.
La cour considère qu’il sera indispensable de préserver l’équilibre entre l’opérateur de l’aide bilatérale et l’établissement financier. Elle juge satisfaisante la situation financière actuelle de l’agence, mais souligne que la vigilance devra être accrue face aux nouveaux objectifs d’expansion. Elle recommande de consolider la gouvernance et la gestion de l’agence, avec un meilleur pilotage de l’état. Elle encourage à la mise en place d’une réelle politique d’évaluation et de mesure de la performance des financements du groupe. Enfin, elle incite à améliorer la gestion de l’agence via une réforme du statut du personnel et une maîtrise des rémunérations.
Recommandations de la cour des comptes
1. s’assurer que le besoin de financement à long terme des objectifs de croissance d’activité assignés à l’afd d’ici 2020 est cohérent avec ses contraintes prudentielles ;
2. veiller à ce que le conseil d’administration statue effectivement sur la stratégie, le modèle économique et la politique d’évaluation ;
3. mieux définir le rôle et la place de la société proparco dans la stratégie du groupe et engager le conseil d’administration de l’afd à définir le lien stratégique entre la maison mère et sa filiale ;
4. renforcer et systématiser la politique d’évaluation de l’afd ;
5. réformer, avant 2020, le statut d’emploi des personnels du groupe afd, notamment en modifiant le système de rémunération, en y intégrant une prise en compte de la performance.
Les dernières évolutions législatives relatives à l’AFD
La loi de finances initiale pour 2019 a procédé à la rebudgétisation de la fraction de la taxe sur les transactions financières (TTF) affectée à l’AFD, représentant 270 millions d’euros. Il s’agissait d’accroître la lisibilité des circuits de financement de l’aide publique au développement en concentrant l’intégralité de l’affectation de TTF au fonds de solidarité pour le développement (FSD). Cette évolution de l’architecture budgétaire était en ligne avec les préconisations du rapport Berville, qui faisait le constat d’un dispositif de financement « rendu encore moins intelligible par la hausse des dépenses extrabudgétaires » et soulignant que « la complexité de cette architecture budgétaire limite fortement les capacités de contrôle du parlement ».
L’article 34 de la loi du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude prévoit que l’AFD et les sociétés ou établissements publics qui lui sont liés « ne peuvent participer au financement d’un projet si l’actionnaire de contrôle est immatriculé dans un état ou territoire considéré comme non coopératif », sauf si celui-ci établit que son immatriculation est justifiée par un intérêt économique réel ou lorsque le projet financé est réalisé dans l’état ou le territoire concerné.