LCP : Reprise de la dette de la SNCF : les députés de l’opposition voient rouge

« Oui, à partir du 1er janvier 2020, l’État reprendra progressivement de la dette » de SNCF Réseau. La promesse d’Emmanuel Macron, dimanche sur BFMTV, n’en finit pas de faire des vagues. Et beaucoup se perdent en conjecture… Une reprise de la dette progressive, oui, mais selon quel calendrier ? Quels scénarios faut-il échafauder ? Et aussi, quelles conséquences faut-il attendre pour les finances de l’État et donc, in fine, pour le contribuable ?

Les députés de la commission des Finances souhaitaient obtenir des réponses, en recevant mercredi le patron de SNCF Réseau, Patrick Jeantet, mais aussi Martin Vial, le commissaire aux participations de l’État ainsi que la directrice du Budget, Amélie Verdier. Un aréopage qui se souviendra de cette rencontre…

Cela commence mal : les députés s’aperçoivent qu’aucun compte rendu n’est prévu pour ces auditions. Après quelques atermoiements, le problème est levé. La séance peut commencer.

« Gloubiboulga »

Joël Giraud (LREM), le rapporteur général du Budget, regrette que ce débat ait lieu si tard. Ce membre de la majorité manie la litote : « Il y a un côté frustrant, dit-il, à avoir voté hier une loi ferroviaire et de ne pas pu avoir eu ce type de débat avant… »

Patrick Jeantet semble bien en peine de répondre précisément aux questions des députés. « Les discussions sont en cours avec l’État sur la dette et le déficit », explique-t-il, avant de développer un exposé très technique de la situation de SNCF Réseau, la société gestionnaire des infrastructures ferroviaires qui porte la dette de 46,6 milliards d’euros. Il parle « dette obligataire à long terme », « base investisseur », « contrats de swap » et « green bond ». Les députés s’impatientent : ils ne veulent pas entendre parler de « technique », mais de « stratégie ».

La présidente du groupe socialiste à l’Assemblée, Valérie Rabault, goûte peu ce « gloubiboulga ». « Je suis de la génération Casimir… », dit-elle dans un sourire. Mais la détente est de courte durée.

« C’est encore plus nébuleux qu’avant ! »

Lorsque la directrice du Budget Amélie Verdier lance aux députés « Nous n’avons pas de montant à vous donner aujourd’hui sur la reprise de la dette », l’assistance se déchaîne. La députée LR, Valérie Lacroute, notamment : « Nos questions sont sans réponse ! Nous assistons à une présentation sans document pour examiner de manière plus précise la structuration de cette dette, c’est inadmissible pour un sujet de cette ampleur ! ». Elle ajoute : « Je croyais comprendre la question de la dette de la SNCF, mais au vu de cette audition, c’est encore plus nébuleux qu’avant ! »

Martin Vial tente de recadrer le débat. « Jusqu’à 2026, si rien n’est changé, la dette (de SNCF) pourrait atteindre 62 milliards d’euros. » Commissaire aux participations de l’État, il est chargé d’accompagner les sociétés dans lesquelles l’État a investi. Il explique qu’ « il ne peut y avoir de redressement financier de l’entreprise sans traiter le sujet de la dette. »

Dialogue de sourds

Le montant de la SNCF, l’autre sujet explosif… À combien s’élève-t-elle, au juste ? Pilier de la commission des Finances, Charles de Courson (UDI, Agir et indépendants) explose à son tour. « Nous sommes en train de vivre ce qu’est un Parlement humilié !.. « , hurle-t-il. « Bafoué ! », renchérit son collègue Philippe Vigier. Pour lui, le montant de la dette que l’État devra reprendre sera plus important que prévu. Il s’étrangle en agitant les bras : « Mesdames-messieurs les hauts fonctionnaires de l’État, veuillez répondre aux représentants du peuple français ! »

« Il n’y a pas de volonté de masquer des chiffres », assure Martin Vial. Amélie Verdier reconnaît, elle, que « la reprise de la dette de la SNCF aura un impact sur les finances de l’État. »

La reprise de la dette sera tranchée par le Parlement lors de la discussion du projet de loi de Finances, à l’automne prochain. D’ici là, les débats ne risquent pas de s’éteindre…

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