Désigné comme rapporteur général de la commission des Finances de l’Assemblée nationale, Joël Giraud explique à Contexte son parcours et la manière dont il entend travailler.
Élu depuis 2002, vous étiez, jusqu’ici, à la commission des Affaires économiques. Ce n’est que récemment que vous êtes passé aux Finances. Pourquoi ce changement ?
Quand vous êtes un jeune député qui débute, vous avez rarement le droit d’aller aux Finances, surtout quand vous appartenez à un parti qui n’est pas en position de force dans son propre camp, comme c’est le cas du Parti radical de gauche. J’ai donc commencé par officier dans la commission des Affaires économiques, où j’ai été très heureux.
Mais au bout d’un moment, vous vous rendez compte que si vous voulez faire bouger le système, tout se passe à la commission des Finances. Sur les questions des collectivités locales, qui m’intéressent beaucoup, ce n’est qu’au travers des amendements budgétaires que vous pouvez faire avancer les choses.
Vous venez d’être nommé rapporteur général de la commission des Finances. Comment avez-vous été désigné ?
Dès le dimanche soir du premier tour des élections législatives, le président de la République m’a appelé et m’a proposé d’occuper ce poste.
Il y a eu ensuite une élection interne au sein du groupe LRM, où un nouveau député, Laurent Saint-Martin, a obtenu deux voix de plus que moi. Nous sommes tombés d’accord pour que j’occupe la place pendant deux ans et demi, et que je fasse du tutorat pour lui passer le flambeau à mi-mandat.
Comment s’organise l’articulation avec les différents responsables de la commission, et notamment son président, Éric Woerth ?
Tout se passe très bien avec l’équipe LRM au sein de la commission, que ce soit Amélie de Montchalin, la Whip [chargée de coordonner les députés du groupe ndlr], Émilie Cariou, qui est une très bonne fiscaliste et connaît bien les questions européennes, et Laurent Saint-Martin, qui est vice-président. Il a déjà eu l’occasion de me remplacer au banc, en séance publique.
Les relations sont aussi bonnes avec Éric Woerth (LR), nous avons chacun notre rôle. Ce n’est pas à moi de m’immiscer dans les choix de l’opposition, je prends acte de leurs votes et je travaille avec ceux qui sont désignés. Je fais partie des gens qui ne cherchent jamais le conflit.
Une révision de la procédure d’examen parlementaire des lois de finances est en préparation. Quelles en sont les grandes lignes ?
Je ne suis pas du tout satisfait de la manière dont se déroulent les débats, notamment sur la deuxième partie du budget. C’est effroyablement long et on refait en séance ce qui a déjà été fait en commission. Il faut réduire les temps d’intervention pour que les échanges soient plus lisibles et efficaces.
La réforme qui a mis en place les commissions élargies [réunissant les députés de plusieurs commissions, ndlr] est partie d’une bonne intention. Mais dans la réalité, vous vous retrouvez le plus souvent à trois membres de la commission des Finances, à une heure du matin, quand il faut voter les amendements. Ce n’est pas satisfaisant.
Je souhaite également une réduction du nombre de rapports budgétaires, et que la mission des rapporteurs soit renforcée. Ils ne doivent pas se contenter d’écrire un rapport par an, mais aussi assurer un contrôle de l’exécution budgétaire tout au long de l’année.
Tout cela est plus facile à mener avec une majorité de nouveaux députés, mais cela nécessite d’avoir l’accord des présidents de commission. Et vous ne vous faites pas que des amis en réduisant le nombre des postes de rapporteur.
Avec vos nouvelles fonctions, les lobbys vont beaucoup vous solliciter. Quelles sont vos relations avec eux ?
J’écouterai tous les secteurs d’activité qui sont impactés par les textes que l’on vote, sans pour autant m’ouvrir à un lobbying effréné. Je pense que du dialogue peut naître la lumière.
Parfois, nous avons de fausses bonnes idées, et il est bien de pouvoir s’en rendre compte. Mais nous avons aussi, de temps en temps, de vraies bonnes idées, et il ne faudrait pas qu’un lobbying intensif nous y fasse renoncer.
Je suis également très attaché à la stabilité et à la lisibilité de notre politique. Quand nous prenons des décisions, il faut nous y tenir au lieu d’en changer tous les trois matins.
Je ne serai pas candidat la prochaine fois, c’est mon dernier mandat. Je n’aurai donc à faire plaisir à personne et quand je suis déterminé à faire quelque chose, je vais jusqu’au bout.