Les projets de loi organique et ordinaire relatifs à la dette sociale et à l’autonomie adoptés hier par le Parlement interviennent dans un contexte économique fortement dégradé par les conséquences de l’épidémie de Covid-19.
L’équilibre financier de la sécurité sociale est affecté tant en recettes (recul de la masse salariale et donc des contributions sociales, reports et annulation de paiements de cotisations et contributions sociales) qu’en dépenses (augmentation des dépenses d’assurance maladie principalement). Comme l’a indiqué le Ministre de l’action et des comptes publics le 2 juin à l’Assemblée nationale, les déficits prévisionnels pour la seule année 2020 sont ainsi estimés à 52Mds €, montant jamais atteint même au plus fort des conséquences de la crise financière de 2008.
L’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) n’a pas vocation à porter durablement la constitution de tels déficits et ne possède pas les outils pour financer cette dette sur les marchés financiers. C’est pourquoi les deux projets de loi prévoient un transfert de dette de 136 Mds € à la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES), qui avait été créée à l’origine en 1996 pour 13 ans, ce qui allonge sa durée de vie de 2024 à 2033.
Techniquement, il fallait faire ce transfert, car cela sécurise l’ACOSS. A long terme, quand reviendra la sérénité sur les marchés, Joel Giraud estime même qu’ «il faudrait songer à avoir un seul émetteur de dette publique pour la dette de long terme, quitte à réaffecter une partie des recettes actuelles de la CADES à la sécurité sociale, par exemple la fraction de CSG (contribution sociale généralisée), et transformer la CRDS (contribution au remboursement de la dette sociale) en contributions au remboursement de la dette publique (CRDP) et l’affecter à l’Etat ».
Cet allongement de la durée de vie de la CADES pose indirectement la question du financement des nouvelles dépenses relatives au grand âge et à l’autonomie dans la mesure où l’utilisation de certaines recettes affectées à la CADES était envisagée comme une piste de financement pour relever le défi du vieillissement de la population. Pour répondre à ces interrogations, les deux projets de loi sanctuarisent une part des recettes de la CADES (0,15 points de CSG) pour la flécher à partir de 2024 vers les dépenses relatives au Grand âge. Ils ouvrent aussi la réflexion sur la création d’un risque spécifique de protection sociale ou d’une cinquième branche de sécurité sociale relative à l’aide à l’autonomie des personnes âgées et des personnes en situation de handicap en proposant la remise d’un rapport sur les modalités de sa mise en œuvre.
Cette réorganisation du PLFSS est une avancée majeure qui permettra une meilleure lisibilité concernant la prise en charge du risque de perte d’autonomie. Elle ouvre la voie à une réflexion plus large sur la forme que prendra cette nouvelle structuration et les financements qui permettront de couvrir ces dépenses, au moyen d’un rapport qui sera remis au Parlement avant le 30 septembre sur les opportunités pour la CADES de contracter des emprunts à l’impact social.
Pour Joël Giraud, la crise sanitaire a mis en exergue au travers de la fragilité de nos ainés le défi sociétal et économique incontournable auquel il nous faut répondre avec responsabilité. Cette avancée législative en acte la prise de conscience.